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Évaluation de l’aptitude à l’utilisation des dispositifs médicaux : Méthodologies et normes CE/FDA

Avec l’émergence de nouvelles technologies, les méthodes d’évaluation se transforment, intégrant des outils de prototypage interactif, la réalité virtuelle ou encore l’analyse de données biométriques.

Résumé de l’article en 30 secondes :

 

Ces avancées offrent aux fabricants des moyens plus rapides et précis pour concevoir des dispositifs sûrs et intuitifs. Cependant, répondre aux exigences des normes CE et FDA reste un défi de taille, entre complexité réglementaire et innovation technologique. Cet article explore les évolutions des méthodologies d’évaluation, les contraintes réglementaires et les solutions pour surmonter les obstacles dans le développement de dispositifs médicaux performants. Entretien avec Ilona Giraud et Amandine Broussier, co-fondatrice de la société Usarea, une société pour rendre les dispositifs médicaux plus intuitifs, plus sûrs, et vraiment adaptés à ceux qui les utilisent.

Comment les méthodologies d’évaluation de l’aptitude à l’utilisation des dispositifs médicaux ont-elles évolué avec l’arrivée de nouvelles technologies ?

Avec l’arrivée de nouvelles technologies, les méthodes d’évaluation de l’aptitude à l’utilisation des dispositifs médicaux ont évolué. Ces approches permettent aujourd’hui de concevoir, tester et ajuster les dispositifs plus rapidement, tout en optimisant les coûts et les délais de développement.

Prototypage rapide et interactif

Des outils de prototypage tels que Figma, Axure ou Adobe XD permettent de créer rapidement des interfaces interactives. Ils permettent de réaliser des tests utilisateurs en amont, avant même que le produit final ne soit développé. Cela facilite l’obtention de retours rapides et itératifs, ce qui est un atout majeur pour identifier les éléments à conserver, les défauts et les erreurs d’utilisation dès les premières phases de conception.

Analyse des interactions grâce aux données objectives

L’intégration de capteurs et d’outils d’analyse de données en temps réel a transformé les méthodologies d’évaluation. Par exemple, l’enregistrement des mouvements oculaires (eye-tracking) et la collecte de données biométriques (ex : rythme cardiaque) fournissent des informations objectives sur les réactions des utilisateurs, complétant ainsi les observations traditionnelles. Toutefois, pour approfondir les causes, le modérateur doit mener une analyse supplémentaire : un élément est-il plus regardé en raison de sa taille ou, au contraire, parce qu’il est difficile à lire ?

Simulation avec la réalité virtuelle et augmentée

Certaines méthodologies intègrent désormais la réalité virtuelle (VR) ou augmentée (AR) pour simuler des environnements réels. Cela permet de tester un dispositif médical dans une salle d’opération virtuelle, permettant de réaliser des scénarios d’utilisation réalistes. Cela permet d’obtenir des retours plus rapidement avant d’engendrer des coûts plus importants.

Automatisation et intelligence artificielle

L’intelligence artificielle (IA) permet également d’automatiser certaines parties des évaluations. Par exemple, certains outils permettent de traduire des tests, transcrire ce qui a été dit ou extraire les principales tendances. Cependant, ces outils restent des assistants. L’analyse finale doit toujours être réalisée par des experts pour garantir une interprétation précise et fiable des résultats.

Enfin, certains tests peuvent être réalisés à distance, comme l’évaluation des interfaces ou la lecture de notices. On peut même aller jusqu’au test de dispositif physique en envoyant celui-ci directement au participant. Cela permet d’élargir l’accès aux participants tout en obtenant des retours en temps réel. Des plateformes comme Maze ou UserTesting facilitent ces tests d’utilisabilité à distance et permettent de toucher un grand nombre de participant.

Ces évolutions technologiques ouvrent donc la voie à des évaluations plus rapides, précises et riches en données. Cependant, elles posent également des défis, notamment :

  • Accessibilité financière : certains de ces équipements restent coûteux.
  • Complexité d’analyse : l’interprétation des données (notamment pour l’eye tracking et les capteurs physiologiques) nécessite des compétences spécifiques.
  • Conformité réglementaire : il faut s’assurer que ces nouvelles approches respectent les exigences des normes comme l’EN 62366 ou les attentes des autorités telles que la FDA. Par exemple, les tests à distance ne sont pas recommandés par la FDA pour l’étude sommative car certains micros-comportements ne sont pas détectables à distance.

Les nouvelles technologies peuvent donc profondément transformer les méthodologies d’évaluation de l’aptitude à l’utilisation. En combinant l’utilisation d’outils modernes et l’expertise humaine, ces approches permettent de concevoir des dispositifs adaptés aux réels besoins des utilisateurs. Ces technologies offrent ainsi une opportunité de rendre les dispositifs plus sûrs, intuitifs et efficaces.

En quoi les normes CE et FDA garantissent-elles la sécurité et l’efficacité des dispositifs médicaux, et comment les entreprises peuvent-elles répondre à ces exigences ?

Le marquage CE et l’agrément FDA jouent un rôle central pour garantir que les dispositifs médicaux sont à la fois sûrs et efficaces, respectivement au sein de l’Union Européenne et aux États-Unis. Pour y parvenir, les fabricants sont tenus de respecter le règlement (UE) 2017/745 (MDR) pour les dispositifs médicaux, le règlement UE 2017/746 (IVDR) pour les dispositifs de diagnostic in vitro et la guidance FDA. Ces textes ont pour objectif de garantir la sécurité et l’efficacité des dispositifs médicaux.

Le MDR, exige que les fabricants suivent l’état de l’art, ce qui, en matière d’aptitude à l’utilisation, correspond aux normes EN 62366-1 :2015+A1 :2020 pour les dispositifs médicaux et l’EN 60601-1-6 :2010+A1 :2020 pour les dispositifs électro médicaux.

De son côté, la FDA impose l’application de guidances précises, comme la Human Factors and usability engineering Guidance.

Ces deux cadres réglementaires obligent les fabricants à mettre en place un processus d’ingénierie de l’aptitude à l’utilisation. L’objectif : concevoir des dispositifs qui minimisent les risques d’utilisation, qu’ils soient liés à une mauvaise manipulation ou à des problèmes ergonomiques. Comment ? En observant comment les utilisateurs interagissent avec le dispositif dans son environnement d’utilisation et en étudiant l’impact de la conception des interfaces utilisateurs sur ces interactions. De ce fait, ce processus permet également d’améliorer la facilité d’utilisation, l’efficacité, le rendement et la satisfaction de l’utilisateur.

Pour répondre à ces exigences, les fabricants doivent notamment suivre le processus d’aptitude à l’utilisation décrit dans l’IEC 62366-1 :2015/AMD1 :2020, c’est-à-dire :

  • Définir la spécification d’utilisation : identifier qui utilisera le dispositif, comment, et dans quel contexte.
  • Implémenter une gestion des risques d’usage (URRA) : identifier les erreurs potentielles liées à l’utilisation et mettre en place des mesures de maitrise adaptées conformément à l’ISO 14971.
  • Sélectionner les scénarios pour l’évaluation sommative : choisir les scénarios à évaluer tout en priorisant les scénarios critiques basés sur les risques identifiés.
  • Définir la spécification de l’interface utilisateur : prendre en compte la spécification d’utilisation et les risques d’usage pour concevoir des interfaces claires, adaptées aux utilisateurs et sûres d’utilisation.
  • Établir le plan d’évaluation de l’interface : anticiper les évaluations formatives et sommatives.
  • Concevoir le dispositif et réaliser des évaluations formatives : il est fortement recommandé de réaliser des évaluations formatives afin d’améliorer le dispositif et vérifier l’efficacité des mesures de maitrise des risques mises en place.
  • Réaliser une évaluation sommative : tester le dispositif final auprès d’au moins 15 participants par groupe utilisateur représentatif. Cette évaluation permet de vérifier que les mesures de maitrise des risques mise en place sont efficaces et donc que le les risques résiduels sont maîtrisés et que le dispositif est prêt à être utilisé par les utilisateurs dans l’environnement prévu.
  • Documenter chaque étape : toutes les activités doivent être documentés et chaque document peut être mis à jour au fil du processus.

Les fabricants doivent également prendre en compte tous les cycles de vie concernés, c’est-à-dire, sans toutefois s’y limiter : le transport, le stockage, l’installation, le fonctionnement (utilisation), la maintenance et réparation, et l’élimination du dispositif.

En respectant le MDR et les directives FDA, les fabricants assurent la conformité réglementaire tout en garantissant la sécurité et la satisfaction des utilisateurs finaux. En suivant un processus d’ingénierie de l’aptitude à l’utilisation rigoureux, ils peuvent anticiper les risques, améliorer leurs dispositifs et offrir des solutions adaptées aux besoins des utilisateurs dans des contextes réels d’utilisation.

Quels sont les principaux défis rencontrés par les fabricants de dispositifs médicaux lors du processus d’évaluation, et comment y faire face efficacement ?

Lors du processus d’évaluation, les fabricants de dispositifs médicaux rencontrent de nombreux défis.

Comprendre les exigences réglementaires

Face au nombre et à la complexité des exigences réglementaires, il est souvent difficile de les comprendre pleinement. De plus, ces exigences peuvent varier selon les marchés et évoluer dans le temps, devenant rapidement un vrai casse-tête pour les fabricants.

Afin d’assurer la conformité et de prévenir les erreurs coûteuses, il est fortement recommandé de faire appel à des experts. Ces derniers apportent une compréhension approfondie des normes applicables et les meilleures pratiques à adopter pour les appliquer. En complément, sensibiliser les équipes projets grâce à des formations spécifiques permet de mieux intégrer ces exigences dans les processus de conception.

Définir les erreurs potentielles d’utilisation

Les fabricants ont souvent des difficultés à définir précisément les erreurs potentielles d’utilisation. Par exemple, une définition telle que « l’utilisateur ne comprend pas la notice » ne définit pas une erreur d’utilisation mais la cause potentielle de celle-ci : il faut définir précisément quelle information n’est pas comprise car les conséquences ainsi que les sévérités associées peuvent différer.
Pour y faire face, il est important de comprendre ce qu’est un risque d’usage et de bien définir les scénarios d’utilisation qui vont mener à l’erreur potentielle d’utilisation.

Recruter les participants 

Trouver un échantillon représentatif d’utilisateurs (patients, professionnels de santé) peut être difficile et retarder l’évaluation. De plus, pour les professionnels de santé, il faut s’assurer de respecter les lois anti-cadeaux et la déclaration transparence, ce qui peut ajouter une difficulté.

Comment y faire face ?

  • Anticiper le recrutement au minimum 3 à 4 semaines avant le début de l’étude.
  • Rédiger un screener de recrutement précis avec les critères d’inclusion et d’exclusion.
  • Faire appel à des prestataires experts en recrutement.
  • Collaborer avec des centres de soins et des associations de patients.

Gérer les risques d’usage rencontrés lors de l’évaluation sommative

Les fabricants se demandent souvent ce qu’ils doivent faire lorsque des erreurs d’utilisation ont été rencontrées lors de l’évaluation sommative.

La première chose à faire est d’analyser les causes profondes de chaque erreur d’utilisation rencontrée, analyser le risque résiduel et conclure :

  • si des modifications sont impossibles (impossibilité technique ou aucun autre moyen de maitriser le risque), un rationnel sera à faire pour justifier cette impossibilité ;
  • si des modifications sont réalisables et permettent de réduire le risque, elles devront être implémentées et il faudra recommencer le processus d’aptitude à l’utilisation depuis la spécification d’utilisation. A noter, que seules les parties d’interfaces impactées par les modifications devront de nouveaux suivre le processus. La nécessité de réaliser une nouvelle évaluation sommative sera déterminer en fonction de l’impact sur les risques (impact de risques majeurs, création de nouveaux risques).

Un moyen de réduire la probabilité que les utilisateurs rencontrent des erreurs d’utilisation est de réaliser des évaluations formatives tout au long du développement. Ces évaluations moins coûteuses permettent d’itérer rapidement et d’obtenir des retours utilisateurs tout au long du développement.

Manque de ressources

Le manque de ressources (temps, budget, expertise) complique souvent l’intégration de l’aptitude à l’utilisation dans le processus de développement.

Comment y faire face ?

  • Planification : identifier toutes les étapes à mettre en place ainsi que les ressources impliquées dès le début de votre projet.
  • Réaliser des évaluations formatives : cela vous permettra de réduire le risque de découvrir de nouvelles erreurs d’utilisation lors de l’évaluation sommative mais également de réduire la possibilité que les utilisateurs rencontrent celles déjà identifiées. Réaliser ces évaluations vous permettra de limiter les changements coûteux en fin de projet si vous devez de nouveau réaliser le processus suite à des modifications post-sommative.
  • Former vos équipes et réaliser de la sensibilisation interne.
  • Faire appel à des experts pour garantir une approche efficace et éviter les erreurs de compréhension du processus et oublis.
  • Intégrer le budget lié à l’aptitude à l’utilisation lors de vos levées de fond.

Gestion de la documentation et de la traçabilité

Chacune des étapes du processus doit être documentée et fera l’objet d’une revue lors de l’audit. Il arrive régulièrement que de nombreuses actions aient été réalisées mais non documentées (entretiens avec des utilisateurs qui pourraient être considérés comme une évaluation formative, choix de conception qui ne sont pas documentés dans le plan de l’interface utilisateur, observations réalisées pour décrire l’environnement d’utilisation).

Pour y faire face, il est nécessaire d’adopter une procédure de documentation stricte pour que chaque action et décision soient tracées et documentées dans le dossier d’aptitude à l’utilisation.

Peut-on considérer que les processus de certification CE et FDA sont adaptés à la rapidité d’innovation dans le secteur de la MedTech, ou nécessitent-ils une réforme ?

Les processus de certification CE et FDA sont essentiels pour assurer la sécurité et l’efficacité des dispositifs médicaux. Cependant, leur complexité et durée de réalisation sont souvent considérées comme des obstacles à la rapidité d’innovation, notamment dans un secteur aussi dynamique que la MedTech.

Parmi les défis rencontrés, on peut notamment souligner :

  • L’émergence des nouvelles technologies : l’arrivée de l’intelligence artificielle (IA) permet le développement de dispositifs connectés, logiciels médicaux, etc qui évoluent beaucoup plus vite que les cadres réglementaires. Les exigences classiques ne prennent pas toujours en compte les particularités de ces technologies (ex : mises à jour fréquentes).
  • Durée des processus : les processus à mettre en place sont très longs, ce qui est problématique dans un secteur où la rapidité est clé.
  • Ressources limitées : les entreprises manquent parfois des ressources financières et humaines nécessaires pour répondre aux exigences.

Néanmoins, des efforts ont été réalisés pour mieux s’adapter à l’innovation :

  • Pour le marquage CE : l’entrée en vigueur prochaine de l’IA Act montre une volonté des autorités de poser un cadre réglementaire et juridique concernant l’intelligence artificielle.
  • Pour la FDA : la mise en place du programme Safer Technologies Program (SteP) vise à accélérer l’approbation des technologies susceptibles d’améliorer de manière significative la sécurité des traitements ou diagnostics actuels.

Malgré ces initiatives, des réformes supplémentaires pourraient renforcer l’adaptabilité :

  • Flexibilité pour les logiciels : inclure des processus spécifiques pour valider les mises à jour logicielles rapides sans nécessiter une recertification complète.
  • Soutien financier : aider les fabricants dans leurs levées de fond.
  • Harmoniser les exigences : s’assurer que les exigences des différentes normes ne soient pas contradictoires et qu’elles s’intègrent les unes avec les autres.

Les processus de certification CE et FDA sont essentiels pour garantir la sécurité et l’efficacité des dispositifs médicaux, mais ils peinent parfois à suivre la rapidité d’innovation dans le secteur de la MedTech. Bien que des efforts aient été faits pour mieux intégrer les nouvelles technologies, des réformes ciblées sont nécessaires pour concilier innovation et exigences réglementaires.

Comment les autorités sanitaires peuvent-elles garantir que les évaluations d’aptitude à l’utilisation tiennent compte des besoins et des profils divers des utilisateurs finaux ?

Les normes CE et guidance FDA garantissent que les évaluations d’aptitude à l’utilisation tiennent compte des besoins et des profils divers des utilisateurs finaux en imposant des cadres réglementaires stricts.

Dans un premier temps, les fabricants doivent mener des études approfondies sur leurs utilisateurs cibles et définir précisément leurs groupes d’utilisateurs cibles (patients, professionnels de santé, etc.) en tenant compte de leurs caractéristiques physiques (taille, âge, morphologie, etc.), de leur expérience, de leur formation, leurs capacités physiques ou cognitives (personnes âgées, handicaps etc.), et leur environnement d’utilisation (hôpitaux, domicile, situation d’urgence, stress, etc.).

De plus, les risques d’usage associés à tous les profils utilisateurs doivent être identifiés et documentés (transporteur, médecin, personnel de maintenance, etc.).

Les évaluations sommatives doivent inclure des échantillons d’utilisateurs représentatifs pour valider que les dispositifs répondent à leurs besoins et qu’ils ne rencontrent pas de difficultés lors de l’utilisation quel que soit le groupe utilisateur.

Les autorités exigent et examinent minutieusement la documentation soumise par le fabricant qui doit prouver que l’ensemble des utilisateurs a été pris en compte dans la conception et les évaluations, permettant ainsi de réduire l’apparition des risques d’usage identifiés. Si la documentation montre que des groupes utilisateurs ou parties d’un groupe utilisateur ont été négligés, l’approbation peut être retardée ou refusée.

En imposant des cadres réglementaires stricts, les autorités favorisent donc une conception centrée sur les utilisateurs afin de minimiser l’apparition des risques liés à une erreur d’utilisation, améliorant ainsi la sécurité et l’efficacité des dispositifs médicaux pour tous les profils utilisateur.

En pratique, quelles différences existe-t-il entre les normes CE et FDA en termes de processus d’évaluation et d’approbation des dispositifs médicaux ?

En matière d’aptitude à l’utilisation, si pour l’Europe, la référence à suivre est la norme EN 62366-1:2015+A1:2020, pour la FDA, la références est le guide « Applying Human Factors and Usability Engineering to Medical devices ». Néanmoins, la norme 62366 est reconnue et acceptée par la FDA, en revanche, quelques différences notables existent entre les attentes des autorités européennes et celles des autorités américaines. Petit tour d’horizon pratique de ces différences.

Terminologies

  • En Europe, on privilégie les termes « aptitude à l’utilisation » et « spécification d’utilisation », tandis que la FDA utilise des expressions comme facteurs humains » (« Human factors ») et « Utilisateurs de dispositifs, environnements d’utilisation et interface utilisateur » (« Device Users, Use environments and user interface »), qui couvrent les mêmes concepts.
  • Des légères variations dans certaines définitions sont également à noter.
  • L’évaluation sommative en Europe correspond aux tests de validation des facteurs humains selon la FDA.

Interaction/communication/revue

Généralement, pour l’Europe, le dossier d’aptitude à l’utilisation est revu par l’organisme notifié lors de l’audit final même s’il arrive parfois de soumettre le plan d’évaluation lors d’audit intermédiaire pour fournir des preuves à l’organisme notifié qu’un processus d’aptitude à l’utilisation est en cours. En revanche, la FDA, avec son programme de pré-soumission vous offre la possibilité et vous encourage vivement à soumettre votre protocole d’évaluation de validation des facteurs humains pour revue par leur comité d’experts en facteurs humain. Cette revue vous permet notamment d’ajuster votre protocole avant de réaliser vos tests en vous basant sur les retours de la FDA. Le programme de pré-soumission de la FDA est donc une excellente opportunité pour obtenir un retour d’experts avant de réaliser vos tests, ce qui permet d’anticiper d’éventuels ajustements et d’éviter des coûts supplémentaires liés à des tests non conformes.

Évaluation sommative 

Au-delà de la différence de terminologie et de la revue, quelques autres différences sont à noter entre l’Europe et la FDA :

  • Soumission à un Institutional Review Boards (IRB) : si en Europe, il existe rarement une nécessité de soumettre votre protocole à un comité d’éthique, la FDA vous encourage vivement à soumettre votre protocole à un IRB pour garantir la sécurité des utilisateurs. En revanche, quel que soit le marché, vous ne devez pas oublier de faire signer des consentements de participation à vos participants et vous assurer de leur sécurité et de la protection de leurs données.
  • Lieu des tests : la norme EN 62366 ne mentionne pas de lieu d’étude spécifique, en revanche, pour l’agrément FDA, vous devez réaliser votre étude avec des résidents américains et donc réaliser vos études sur place. La raison ? Les différences culturelles qui peuvent exister entre l’Europe et les États-Unis et les différences en termes de population et de pratique. Vous pouvez essayer de justifier de similarité entre vos utilisateurs européens et les utilisateurs américains mais il vous faudra construire un solide rationnel à soumettre à la FDA. Concernant les tests à distance, ils peuvent être rejetés par la FDA car il existe un risque que vous ne puissiez pas observer correctement les comportements utilisateurs.
  • Population à inclure : la FDA a tendance à être plus exigeante concernant les profils à inclure, on peut notamment vous demander d’inclure quelques profils souffrant de troubles cognitifs, des personnes partiellement autonomes, des mix en termes d’expérience avec des dispositifs similaires etc, d’où l’importance de soumettre votre protocole en amont.

Documentation : 

En Europe, le guide IEC TR 62366-2:2016 suggère d’écrire une synthèse de dossier d’aptitude à l’utilisation (usability engineering report), à ne pas confondre avec le dossier global, on parle ici d’une synthèse qui résume la démarche mise en place mais il s’agit bien d’un document additionnel et optionnel. Celui-ci vous permet notamment d’associer les documents produits pour chacune des étapes et de raconter l’histoire de votre dispositif en expliquant les évaluations réalisées, les modifications réalisées suite à ces évaluations, etc. Un exemple de plan à suivre vous est fourni dans le chapitre 18 du guide IEC TR 62366-2:2016.

En revanche, la FDA exige que vous rédigiez un « Human Factors Engineering Report » ou « Usability Engineering Report (HFE/UE) » qui est un document conséquent et qui explique le processus et les résultats des évaluations. Vous devez notamment y intégrer une discussion concernant les risques résiduels. Une trame à suivre est décrite dans la guidance de la FDA et il est vivement conseillé de la suivre.

Conclusion

L’évaluation de l’aptitude à l’utilisation des dispositifs médicaux représente un défi majeur pour les fabricants, pris entre exigences réglementaires strictes et besoin d’innovation. L’intégration de technologies avancées comme la réalité virtuelle, les simulations interactives et les analyses biométriques transforme profondément les méthodes d’évaluation, permettant de mieux anticiper les risques d’erreurs d’utilisation et d’améliorer la sécurité des dispositifs. Toutefois, la conformité aux normes CE et FDA impose une rigueur méthodologique et documentaire indispensable. Pour rester compétitifs tout en garantissant des produits sûrs et efficaces, les industriels doivent conjuguer innovation technologique et maîtrise des processus réglementaires. Une approche proactive et centrée sur l’utilisateur, soutenue par des outils d’évaluation fiables, apparaît aujourd’hui comme la clé pour relever ces défis et répondre aux attentes d’un marché de plus en plus exigeant.

Mickael Lauffri

Passionné par l'innovation technologique et l'impact de la science sur la médecine, je suis rédacteur spécialisé dans le domaine des technologies médicales.

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